Procès de vols de tracteurs Les commanditaires absents, les petites mains nient
Dix Roumains, qui comparaissent depuis lundi devant le tribunal correctionnel de Nancy, ont nié en bloc, parfois en dépit des évidences, avoir participé à un vaste réseau de vols d'engins agricoles, ayant sévi principalement en France de 2008 à 2010.
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Dix-neuf membres présumés de ce réseau sont poursuivis. Mais dix seulement se sont présentés devant le tribunal, « uniquement des petites mains, alors que les commanditaires ne sont pas là », a estimé un des avocats de la défense, Me Samira Boudiba. « Si je suis venu ici, c'est pour rétablir les faits: je n'ai aucun rapport avec cette affaire », a expliqué à la barre un des prévenus, quasiment avec les mêmes mots que tous les autres suspects.
Selon l'accusation, les équipes de malfaiteurs fonctionnaient toujours de nuit, souvent le week-end, et visaient au hasard des locaux d'entreprise ou des exploitations agricoles, isolés mais à proximité de grands axes routiers, dans lesquels ils entraient par effraction. Tracteurs, pelleteuses, chargeuses ou compacteurs étaient dérobés, puis chargés dans des camions.
Un préjudice de 8 millions d'euros
« On sollicitait des sociétés de transport plus ou moins "claires" en Roumanie qui, après avoir effectué une livraison légale en France, ne repartaient pas à vide et en profitaient pour transporter des engins de chantier volés », a résumé la présidente du tribunal, Catherine Hologne, à l'ouverture de l'audience.
Décrits par les enquêteurs comme « astucieux » et « habiles conducteurs », les voleurs présumés fabriquaient au besoin des rampes de fortune pour effectuer ces chargements. « Des faux documents étaient utilisés pour permettre le transport des engins dérobés jusqu'en Roumanie », a précisé l'accusation. Au total, plus d'une soixantaine de faits avaient été mis en évidence par l'instruction, commis entre 2008 et 2010 dans le Nord-Est de la France, la vallée du Rhône et en Belgique, pour un préjudice total d'environ 8 millions d'euros.
« Une véritable organisation criminelle »
Dénégations systématiques A croire un des accusés, c'est son frère, « un ancien du ministère de l'Intérieur en Roumanie, devenu juge », qui serait en fait visé dans cette affaire. Pour un autre, dont le téléphone portable roumain a été détecté par une borne à proximité d'un vol, « c'est une erreur des autorités roumaines. Quelqu'un veut se faire passer pour (lui) ». Un troisième, dont l'Adn a été retrouvé sur un mégot sur une scène de larcin, avance sans sourciller que « quelqu'un a peut-être pris un de (ses) mégots et l'a placé là où on l'a retrouvé ». Devant cette succession des dénégations, la présidente du tribunal intervient: « Vous avez tous le même système de défense, ça n'est pas très convaincant »...
Les voleurs présumés, âgés de 26 à 52 ans, sont tous originaires de la ville de Borsa (nord de la Roumanie), « un fief où plusieurs personnes se distinguent par un penchant à détourner les lois et où des relations de parenté existent », a souligné l'instruction. Mais les hommes qui comparaissent depuis lundi apparaissent comme les exécutants de ce « réseau mafieux », selon les enquêteurs français. « Une véritable organisation criminelle », à croire le parquet de Bucarest, dont la coopération avec les autorités françaises a été unanimement saluée.
Un marché très lucratif
Un des principaux commanditaires, qui n'a pas fait le voyage en France pour ce procès, est réputé pour « instaurer un climat de terreur » à Borsa. Surnommé « Obezu » (« L'obèse » en roumain), il se partageait le marché particulièrement lucratif de l'importation d'engins volés avec d'autres réseaux mafieux, parfois aidés par des fonctionnaires corrompus, selon l'accusation.
Le procès doit durer jusqu'à vendredi. Les prévenus encourent 7 ans d'emprisonnement, notamment pour vols en réunion et vols aggravés.
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